La réalité de Rachelle

Mon nom est Rachelle et j’ai 64 ans. Mon père vient d’Orléans et ma mère de Navan. J’ai trois sœurs et trois frères. Lorsque je suis née, notre famille vivait sur une ferme à Navan. Cependant, quand j’ai eu sept ans, mes parents ont vendu la maison à Navan et ont déménagé la famille dans le secteur Vanier. À cette époque, un hôtel se situait devant la maison. Mon père, maintenant sans emploi en raison de la vente de la ferme, traversait la rue pour boire au restaurant de l’hôtel. Il rentrait ivre à la maison et battait fréquemment ma mère. Terrorisée, je restais dans une autre chambre. La maison à Vanier était petite ; moi et mes frères et sœurs dormions dans la salle à dîner. Notre mère buvait aussi et ne préparait aucun repas. Affamée, j’ai volé à maintes reprises de la nourriture au magasin du coin. Notre situation familiale était loin d’être enviable. Je cherchais toujours à fuir le chaos qui régnait à la maison. Ainsi, je dormais sur des bancs publics. La police me retrouvait et me raccompagnait à la maison. 

À l’âge de 15 ans, j’ai décroché un emploi dans un salon de coiffure. Mon père insistait pour garder mes chèques de paye. Toutefois, je voulais économiser mon argent, donc je refusais. Ce refus a déclenché toute une colère chez mon père qui m’a mise à la porte de la résidence familiale. Estomaquée par sa réaction, j’ai quitté la maison sans vêtement ni nourriture. Je n’avais absolument rien sur moi. Je me suis alors rendue au salon de coiffure et j’ai demandé l’aide d’une collègue pour trouver un logement. Ma collègue m’a présenté à un vendeur de drogues et je suis restée chez lui pendant six longues années. Je faisais sa vaisselle, nettoyais la maison et lui payais un loyer. L’environnement n’était pas sécuritaire : l’homme recevait des personnes peu fiables à la maison, sans compter les innombrables visites de la police. Pour toutes ces raisons, j’ai décidé de fuir de chez lui et je suis déménagée avec un autre homme habitant sur une concession loin de la ville.

Malheureusement, et à mon insu, il était aussi un vendeur de drogues. Une semaine, lorsque j’étais seule à la maison, j’ai trouvé la réserve de drogues et je me suis abandonnée dans plusieurs jours de consommation abusive. Après plusieurs années d’abus, je me suis finalement enfuie pour aller vivre chez une amie à Vanier. À mon arrivée chez elle, j’ai rapidement compris que mon amie avait négligé les paiements de ses factures, dont son loyer et l’hydro, et ce, pour plusieurs mois consécutifs. J’ai donc payé ses factures afin de lui venir en aide. Néanmoins, suivant ce geste de bonté, mon amie a changé la serrure de sa maison et a conservé tous mes biens. Une fois de plus, je me retrouvais à la rue, seule, découragée ! Je suis alors sombrée, à nouveau, dans plusieurs années de consommation chronique. Je buvais et consommais des drogues pour enterrer ma douleur. J’espérais mourir à un certain point. 

Ces multiples années de souffrance en silence ont pris fin lorsque j’ai entendu parler d’Action Logement. C’est à cet endroit que j’ai rencontré ma travailleuse sociale et peu de temps après, on m’a invité à partager mon histoire lors d’un rassemblement. Suite à mon témoignage devant le comité d’Action Logement, ma vie a complètement changé : je me suis faite offrir un logement subventionné ! Quel bonheur d’avoir mon chez moi, me sentir en sécurité et goûter à une nouvelle liberté. Pour la première fois de ma vie, j’avais ma propre maison et je ne me sentais pas comme une sans-abri. 

Durant la pandémie, j’ai découvert le Centre espoir Sophie. Je suis si reconnaissante d’avoir fait la connaissance de cet endroit. Financièrement, je suis toujours serrée et le Centre m’aide à arrondir mes fins de mois. Les bons repas de Susan et les oreilles attentives des intervenantes allègent mon quotidien. Je peux toujours compter sur le Centre et son existence est nécessaire pour aider les femmes vulnérables de notre communauté. J’ai déjà beaucoup souffert et je sais à quel point on peut avoir mal. Des organismes comme le CeS et Action Logement sauvent la vie de centaines de personnes et il faut valoriser leur travail !

Sincèrement,

Rachelle

Pour plus de renseignements

www.centreespoirsophie.org

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