La réalité de Barbara
Mon nom est Barbara. Je suis née et j’ai grandi à Ottawa. J’ai deux sœurs et deux frères. Nous avons tous grandi dans la pauvreté. Mon père était un alcoolique qui passait plus de temps à la taverne qu’à la maison et du coup, ne participait pas à la vie de famille. Ma mère s’occupait de nous du mieux qu’elle le pouvait. Néanmoins, nous n’avons jamais eu ce que les autres jeunes de mon âge avaient. Par exemple, tous nos vêtements étaient de seconde main. Ma vie n’a pas été facile.
J’avais 16 ans lorsque j’ai eu mon premier garçon. À 13 mois, il est décédé d’importants problèmes de santé ainsi que partiellement sourd et aveugle. Son cœur défectueux a fait en sorte qu’il devait avoir une chirurgie à cœur ouvert le 28 janvier et, avec tristesse, il est décédé le jour précédent. Ce fût la journée la plus difficile de ma vie. Lors de son autopsie, les médecins ont découvert que mon bébé n’était né qu’avec une moitié de cerveau. Je n’étais qu’une adolescente lorsque j’ai vécu cette épreuve. Toujours à l’école secondaire, j’ai jonglé l’école et les visites à l’hôpital durant 13 mois pour être auprès de mon fils.
À 18 ans, j’ai eu mon deuxième garçon. Au début de ma grossesse, j’étais nerveuse que le même scénario se produise. Je n’avais pas fait mon deuil et j’étais toujours en colère contre la vie. Heureusement, j’ai accouché d’un enfant en parfaite santé. À 20 ans, j’ai eu mon troisième garçon et à 25 ans, mon quatrième. J’ai élevé trois de mes enfants en tant que mère monoparentale, comptant sur l’assistance sociale pour rester à la maison, les nourrir, les habiller, les éduquer etc. Je résidais et réside toujours dans une maison de la société de Logement Communautaire d’Ottawa.
À la fin de ma trentaine, j’ai vécu une dépression, songeant à m’enlever la vie, et ce, à plusieurs reprises. Ce sont mes garçons qui m’ont donné la force de continuer à vivre. Je ne voulais pas qu’ils grandissent seuls, sans figure parentale. Néanmoins, au fils des ans, la dépression s’est accentuée. En effet, j’ai perdu mon père en 1996 lorsqu’il était âgé de 56 ans et ma mère en 2010, à la veille de son 70e anniversaire. Depuis ce jour, je ne suis plus la même. Les choses n’étaient plus pareilles sans ma mère ; elle était mon ancrage, la personne qui était toujours là pour m’écouter.
Après les décès de mes parents, ma dépression était de plus en plus sérieuse et inquiétante. Je voulais m’enlever la vie plus que jamais. C’est à ce moment qu’un membre de ma famille m’a invité au Centre espoir Sophie (C.e.S). J’étais très nerveuse et effrayée à l’idée d’aller dans un centre pour femmes, mais à tort puisqu’il s’agit de l’endroit le plus confortable où j’ai mis pied. Je n’étais soudainement plus seule.
Cela fait maintenant quatre ans que je fréquente le Centre espoir Sophie. Il y a une grande diversité de femmes au CeS : certaines sont sans-abris, d’autres sont toxicomanes, alcooliques ou aux prises avec des troubles de santé mentale, tout comme moi. Apprendre à connaître les femmes a été une bénédiction ; savoir que je n’étais pas la seule ayant eu une vie difficile a grandement contribué à ma guérison. Nous sommes toutes les mêmes, toutes égales, peu importe notre situation. De plus, le personnel du CeS est attentionné et ne porte aucun jugement. J’ai pu m’ouvrir et recevoir l’aide et le soutien dont j’avais tant besoin. Depuis les quatre dernières années, j’ai participé à cœur joie à chaque activité tenue au centre : escapades, yoga, méditation, cours de français, ateliers sur la croissance personnelle, arts, jeux de société, cours de cuisine, journée cinéma, fêtes diverses, etc. Nous avons également accès à plusieurs services essentiels tels que la buanderie, la douche, les ordinateurs, des vêtements, une télévision ainsi que des repas chauds, des collations et du café. Lorsque je retourne chez moi, j’anticipe toujours ma prochaine visite au Centre espoir Sophie, où je suis accueillie avec des sourires, de l’amour et de l’attention.
Somme toute, le CeS signifie beaucoup pour moi et les autres femmes. C’est un honneur d’avoir un endroit où nous pouvons nous réunir quelques heures par jour. Bien entendu, les temps sont très durs depuis le début de la pandémie, mais le Centre espoir Sophie est toujours là pour nous. Il ne nous laisse pas tomber. Je ne sais pas où j’en serais sans Sophie, Suzan et Séline qui représentent une grande partie de ma vie et sur qui je peux toujours compter. Elles savent comment me remonter le moral et me redonner le sourire. Les voir à chaque jour rempli un grand vide dans ma vie. Il n’existe aucun autre groupe auquel je préfère appartenir que celui du Centre espoir Sophie !
Sincèrement,
Barbara Faye
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